Hôpital Gabriel Touré : Dr Konaté, le directeur, s’explique Spécial
- Écrit par Aliou SAMASSEKOU
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Après la marche organisée, le 7 novembre 2013, par les travailleuses de l’hôpital Gabriel Touré, nous avons approché le directeur de l’hôpital, Dr Lasseni Konaté, afin de savoir ce qu’il pense des griefs formulés contre lui par les marcheuses.
Les marcheuses du 7 novembre estiment que depuis l’arrivée du nouveau directeur, Dr Lasseni Konaté, elles manquent de tout. « Les ristournes ne nous sont payées, les laboratoires manquent de tout et nos blouses ont vieilli alors que l’hôpital dispose de recettes suffisantes pour faire face à nos besoins ! Nous demandons la démission du nouveau directeur ! », clament-elles. En réponse, Dr Konaté nous explique:
« Depuis ma nomination à la tête du Gabriel Touré, j’ai décidé de mettre fin à des pratiques frauduleuses. Mon agent comptable est très vigilant car il ne cesse de démanteler des réseaux de fraude. Chaque jour, je fais demander à un agent de rembourser des sommes détournées. Du coup, j’ai réduit les revenus illicites de certains agents. Ils m’en veulent donc. ».
Au sujet de l’insuffisance du plateau technique, Dr Konaté déclare: « C’est l’hôpital Gabriel Touré qui a donné des draps à l’opération SERVAL. Nous avions 200 draps au début de l’opération SERVAL. Le ministre de la Santé de l’époque, Makadji, avait offert 46 matelas à l’hôpital. Deux jours après le début de SERVAL, le 13 janvier 2013, le ministère de la Santé avait offert un scanner et un appareil de radiographie à l’hôpital. Un mois plus tard, des agents m’ont fait savoir que la mémoire de ces appareils était trop petite et se sont permis de transporter les malades dans une clinique privée, La Rosette, avec les moyens du Gabriel Touré: ambulance, carburant, chauffeur… A La Rosette, le malade paie 65 000 FCFA pour faire le scanner alors qu’au Gabriel Touré, il ne paie que 30 000. Bref, nos agents ont fait un trafic sur le dos des malades. Je ne peux pas l’admettre. De plus, je ne sais comment certains de agents s’arrangeaient pour faire payer aux malades les frais de radio entre leurs mains au lieu que ces frais soient payés à la caisse. Au regard de la loi, seul l’agent comptable et ses préposés sont habilités à percevoir les sommes payées par les usagers. J’ai contraint nos agents indélicats à rembourser à l’hôpital les sommes indûment perçues. Des médecins internes opéraient les malades à 80 000 ou 150 000 FCFA et empochaient cet argent au détriment de l’hôpital puis, en fin d’année, venaient demander des ristournes et autres avantages ! J’ai mis fin à ces manèges et cela me vaut des ennemis mortels! ».
Dr Konaté révèle qu’à son arrivée à la tête du Gabriel Touré, en décembre 2012, l’hôpital ne disposait, dans ses caisses, que de 18 millions de FCFA. Somme insuffisante même pour payer le salaire des contractuels qui s’élevait à 23 millions. L’hôpital s’était, en outre, endetté à hauteur de 89 millions pour payer des ristournes et primes de garde au personnel. Grâce aux mesures de redressement entamées et au nouveau logiciel de gestion des caisses acquis, Dr Konaté se réjouit du bond financier enregistré par l’hôpital qui, au 31 octobre 2013, a un compte créditeur de 84 millions de FCFA. « Les banques ne faisaient plus confiance à l’hôpital; elles avaient fait savoir qu’elles ne pouvaient pas prêter de l’argent destiné à être distribué sous forme de ristournes et de primes aux agents sanitaires. Le syndicat de l’hôpital est au courant. Le problème, c’est que son secrétaire général voulait un poste de responsabilité qu’il n’a pas obtenu: il m’en veut pour cela. ».
Dr Konaté se dit ouvert au dialogue avec ses collaborateurs ; il souligne que sa structure est le seul hôpital à disposer d’un chargé de communication et d’un conseiller juridique. « Je me réunis périodiquement avec les chefs de services et j’ai demandé, depuis août, au personnel de me proposer la liste des matériels dont il a besoin. C’est un devoir pour un hôpital qui a reçu 80% des blessés de guerre ». Dr Konaté rappelle, au sujet des ristournes réclamées par le personnel, que leur paiement est régi par l’article 77 de la loi hospitalière n° 02-050 du 22 juillet 2002 qui stipule que « chaque établissement hospitalier met en œuvre sur ses excédents une politique d’intéressement de son personnel aux résultats de l’exercice écoulé ». « J’avais initié une demande de paiement des ristournes mais elle a été bloquée par le contrôleur financier, un de mes conseillers, qui m’a fait savoir que l’hôpital ne pouvait pas s’endetter à plus de 96 millions et que les ristournes ne devaient être payées que sur nos excédents de ressources. Je lui ai demandé de venir expliquer cela au comité syndical lors d’une assemblée générale d’information, ce qu’il a fait. Mais il a suffi que le secrétaire général du syndicat ne soit pas nommé au poste qu’il convoitait pour que le climat de travail se détériore. Suites aux grèves et meetings orchestrés par lui, nos recettes ne cessent de baisser. A date d’aujourd’hui, j’ai épongé les dettes de l’hôpital envers la banque – 96 millions-, payé les salaires des contractuels – 23 millions -, les indemnités de responsabilité, les primes de garde. Seules les ristournes n’ont pu être payées. La réalité économique ne permet pas de les payer. Les recettes disponibles ont été déjà positionnées pour le paiement des salaires des contractuels. La loi ne fait obligation de payer des ristournes qu’en cas de disponibilité financière. Mes collaborateurs ne doivent pas perdre de vue qu’en cas de paiement des ristournes, moi aussi j’y aurai une part ! ».
Dr Konaté rejette les critiques liées à l’acquisition d’un nouveau logiciel comptable. Le logiciel, à ses dires, permet de retracer les entrées de l’hôpital et d’empêcher toute fraude. Notre interlocuteur révèle avoir réduit de 3 millions à 150 000 FCFA les factures de téléphone de l’hôpital. « Mon adjoint et moi utilisons nos propres téléphones pour communiquer. Avec le déclenchement de SERVAL, Orange-Mali a donné à quelques responsables de l’hôpital des téléphones à consommation gratuite: mes adversaires ont interprété ce don de mille manières. », explique le chef du Gabriel Touré.
S’agissant des badges que le personnel réclame, Dr Konaté nous confie avoir demandé qu’on lui communique la liste de ceux qui y ont droit. « Dans un premier temps, on m’a soumis une liste de 800 personnes. Grâce au recensement que j’ai effectué, on s’est retrouvé avec un chiffre réel de 600 personnes. La différence – 200 personnes- avait trait à des travailleurs fictifs qui percevaient des salaires, primes et ristournes. Les badges sont, en tout cas, disponibles: j’attends de les mettre dans leur pochette pour les distribuer ».
Abdoulaye Koné
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