Professeur Rokia SANOGO: Une Nyéléni de la profession pharmaceutique au Mali. |
Écrit par Dr Soumaïla COUMARE |
Jeudi, 28 Avril 2016 13:53 |
La rubrique Portrait de pharmacien de votre site est consacrée cette fois-ci à une dame que nous avons comparée à Nyéléni, une femme battante du royaume bamanan de Ségou. Dans un chef d’œuvre musical, Le super Biton National de Ségou, nous apprend que Nyéléni fut une dame qui a valablement rivalisé avec les hommes dans le domaine de l’agriculture, et des autres activités sylvestres et pastorales essentiellement réservées aux hommes en son temps. Tout comme Nyéléni, Pr Rokia SANOGO est la première femme agrégée en Pharmacie... au Mali et, elle est profondément attachée à la valorisation des plantes médicinales du terroir au Mali et sur le reste du continent africain. Elle reste active aux cotés de l’ordre, des syndicats et des autres associations professionnelles pour promouvoir la şişli escort profession pharmaceutique. Ceux qui la connaissent savent, également, qu’elle ne boude pas non plus le terrain politique. Elle vient d’être nommée Chef de Département Médecine Traditionnelle (DMT) de l’Institut National de Recherche en Santé Publique (INRSP) à la suite de la promotion de notre maître, Pr Drissa DIALLO, comme Secrétaire Général du nouveau Ministère de la Recherche Scientifique. Professeur Titulaire Rokia SANOGO, Pharm.D., Ph.D, est Enseignante Chercheure de Pharmacognosie à la Faculté de Pharmacie de l’Université des Sciences des Techniques et Technologies de Bamako. Elle est membre de la Commission Scientifique de l’Ordre des Pharmaciens du Mali, Présidente du Comité Scientifique Interne de l’INRSP, membre du Comité Scientifique et Technique de l’INRSP et Présidente de l’ONG Aide au Développement de la Médecine Traditionnelle (AIDEMET). Elle nous donne ici les raisons de sa grande passion pour la médecine traditionnelle : «Je suis la petite fille d’un fameux tradipraticien de Santé et chasseur de Sofolosso, Yangasso dans le Bendougou dans le cercle de Bla. Notre grand-père paternel, Issa Magnan SANOGO, (paix à son âme) était un fameux chasseur et thérapeute traditionnel de notre zone qui avait soigné dans le temps, avec une issue positive, une femme qui avait des difficultés pour avoir des enfants. Après la mort de notre grand-père, cette femme était revenue à la recherche du même traitement pour une autre femme. Malheureusement personne ne connaissait la recette qui avait permis à beaucoup de femmes d’avoir des enfants». C’est dans une école de santé que nous pouvions connaître des médicaments et des recettes pour aider des femmes en particulier et la population en général pour les différents problèmes de santé. Au cours des études de Pharmacie, les cours de botanique et de biologie végétale, dispensés par le Professeur N’Golo DIARRA, nous ont permis de renouer avec la nature que nous avions laissé dans nos villages. Les excursions botaniques nous ont permis de connaître les noms scientifiques de certaines plantes de notre environnement villageois : ces mêmes plantes médicinales qui avaient été récoltées par nos parents et qui nous avaient servies de remèdes efficaces. L’exercice de confection d’une vingtaine d’Herbiers par étudiant, nous a permis de mieux connaître les noms scientifiques et la morphologie des plantes. Le cours de Pharmacognosie dispensé par le Professeur Mamadou KOUMARE, un des pionniers de la valorisation de la Médecine Traditionnelle Africaine, Père académique des Pharmaciens maliens, nous a vite permis de comprendre l’importance des plantes comme source des médicaments. Notre engouement pour les vertus des plantes s’est renforcé au cours de notre cursus de formation. Un autre élément important a justifié notre intérêt pour la valorisation des ressources de la Médecine traditionnelle: lors de nos différents stages au niveau des officines, nous nous rendions compte que les patients qui y venaient n’étaient pas toujours à mesure d’acheter tous les médicaments prescrits par le médecin traitant. Nous nous sommes dit que les plantes médicinales pourraient offrir d’autres opportunités thérapeutiques plus accessibles aux populations maliennes. C’est dans un souci de contribuer à l’amélioration de l’état de santé des populations maliennes, que nous avons choisi la voie de la recherche sur les ressources de la Pharmacopée et Médecine Traditionnelles, « notre culture, notre avenir». Le point de départ réel du parcours qui nous a conduites à la recherche sur les ressources de la Médecine Traditionnelle, a été l’opportunité offerte par le Professeur Drissa DIALLO en nous confiant le thème "Les Méthodes traditionnelles de Contraception au Mali" pour la thèse d’exercice en Pharmacie. Pour la réalisation de cette thèse, nous avons participé à notre première enquête ethnobotanique en milieu Bamanan, Soninké et Sénoufo du Mali. L’enquête nous a permis de rencontrer un grand nombre de tradipraticien de santé, d’échanger avec eux et les populations sur les ressources de la Médecine Traditionnelle et de recueillir des informations sur les recettes traditionnelles utilisées pour espacer les naissances. Ce premier travail de terrain nous a permis d’apprécier davantage l’importance des ressources de la médecine Traditionnelle à travers le Mali. Les travaux de la thèse ont continué par des études expérimentales sur les trois plantes les plus citées au laboratoire du Département Médecine Traditionnelle (DMT). Nous avons bénéficié de l’encadrement de nos maîtres sous la supervision de Feu Professeur Arouna KEÏTA (Paix à son âme). Les suggestions et appréciations des professeurs Boubacar Sidiki CISSE et N’Golo DIARRA ont été très précieuses et nous ont permis d’améliorer la qualité scientifique de la thèse qui a été soutenue le 24 octobre 1990. Après avoir obtenu le diplôme de Docteur en pharmacie, parmi les différentes possibilités, nous avons opté pour la valorisation des ressources de la Médecine Traditionnelle au Mali. Pour cela nous avons décidé de continuer à faire un stage au niveau du DMT dans le cadre du Bénévolat avant d’aller en Italie pour un Master et un PhD en Pharmacognosie». Son parcourt, de formation et professionnel: Obtention du baccalauréat en série Sciences Exactes au Lycée de Ségou (1980-1983); Etudes pharmaceutiques à l’Ecole Nationale de Médecine et Pharmacie (ENMP) de Bamako (1983 - 1989) avec obtention du Diplôme de Docteur en Pharmacie avec une thèse d’exercice sur le thème: «Plantes contraceptives en Médecine Traditionnelle». Bénévolat de deux ans (1990-1992) au niveau du Département Médecine Traditionnelle (DMT) de l’Institut National de Recherche en Santé Publique (INRSP) Son intérêt pour la valorisation des plantes médicinales lui a amené à faire des études de Pharmacognosie à l’Université de Messine (Italie) où elle a obtenu une Spécialisation en Pharmacognosie (1992-1995) et un Doctorat de recherche en Pharmacognosie (1996 - 1999) avec une thèse de recherche sur la validation scientifique des usages des plantes médicinales utilisées au Mali contre les affections hépatiques et les ulcères gastroduodénaux. Après une transition de deux ans (1999 -2000) entre l’Italie et le Mali, en avril 2001, elle est rentrée définitivement au Mali. En octobre 2001, comme contractuelle, elle a commencé à enseigner la Pharmacognosie aux étudiants en Pharmacie de la Faculté de Médecine de Pharmacie et d’Odontostomatologie (FMPOS). En 2003, elle a été recrutée à la fonction publique et affectée à la FMPOS comme Enseignante Chercheure en Pharmacognosie. En 2005, elle a été inscrite par le Conseil Africain et Malgache pour l’enseignement Supérieur (CAMES) sur la liste d’aptitude aux fonctions de Maître-assistant (LAFMA). L’inscription sur la LAFMA lui a ouvert la voie au Concours d’Agrégation du CAMES. Elle a été admise au 14ème Concours d’Agrégation du CAMES organisé en novembre 2008 à Brazzaville. Elle est la première femme agrégée en Pharmacie au Mali. Elle a été inscrite comme Professeur titulaire de Pharmacognosie sur la liste d’aptitude aux fonctions de Professeurs Titulaires du CAMES en juillet 2014. En plus de l’enseignement, elle mène des activités de recherche sur la pharmacopée traditionnelle du Mali au niveau du Département Médecine Traditionnelle de (DMT) de l’Institut National de Recherche en Santé Publique (INRSP) et cela en collaboration avec des universités africaines et européennes. C’est ainsi qu’elle a participé à des activités de recherche qui ont déjà fait objet de plus de 70 publications scientifiques. Elle a été nommée Chef de Service des Sciences Pharmaceutiques du Département Médecine Traditionnelle (DMT) en février 2014. Au niveau de ce service, elle a priorisé la formation et la recherche de la plante au médicament. Elle a aussi mis un accent particulier sur la production du Sirop BALEMBO, le MTA du DMT de grande consommation, dans le cadre du projet de l’OOAS en 2015 et du partenariat Public-Privé avec le secteur pharmaceutique privé. Elle est experte d’OOAS (organisation Ouest Africaine de Santé) dans l’espace CEDEAO pour l’élaboration des monographies des plantes médicinales et responsable de l’étude de leur toxicité. Elle a été la présidente de Pharmacopée de l’Afrique de l’Ouest (PAO) au lancement en 2013 à Ouagadougou. Après son agrégation, à partir de 2009, elle a participé à l’encadrement et aux soutenances de thèses de Ph.D, de doctorant(e)s africain(e)s du Congo Brazzaville, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Benin, Guinée Conakry, Mali et des stagiaires du Togo, du Niger et de Guinée Conakry. Elle participe à de nombreuses organisations savantes, professionnelles et à de nombreux réseaux dans les domaines des ressources de la MT. Elle participe à l’enseignement dans le cadre des masters sur des substances naturelles au Burkina Faso, en Italie et en France ; elle vient de commencer des missions d’enseignement de la Pharmacognosie au Niger. Dans le cadre des échanges, elle a participé à de nombreuses rencontres scientifiques et de valorisation de la MT au Mali, en Afrique et ailleurs. Ses plus récentes rencontres et communications au Mali en 2015 sont : Communications orales SANOGO R. Les plantes médicinales dans la prise en charge du paludisme dans le cadre de la Journée mondiale de lutte contre le paludisme à l’INRSP le 28 avril 2015. SANOGO R. Partenariat Public - Privé Professionnel Pharmaceutique: Une opportunité pour la production des Médicaments traditionnels Améliorés au Mali 16ème Forum Pharmaceutique International de Bamako du 04 au 06 Juin 2015. SANOGO R. Perspectives de a contribution de la Médecine traditionnelle dans la lutte contre l’épidémie de la Maladie à virus Ebola, dans le cadre de la Journée de la renaissance scientifique de l’Afrique, INRSP, 30 juin 2015 SANOGO R. HADARA M, DENOU A, DIAKITE C., DOUARE I., CAMARA D. et DIALLO D. Plantes médicinales dans la prise en charge des affections hépatiques au Mali au premier congrès international de la société de Médecine interne au Mali, organisé par la Société de Médecine interne du Mali, à Bamako du 02 - 03 septembre 2015. En 2016, elle a participé au 3ème congrès de Neuroscience avec une conférence sur les plantes médicinales dans la prise en charge de l’épilepsie. Communications affichées Au 16ème Forum Pharmaceutique International de Bamako du 04 au 06 Juin 2015; DMT : Médicaments traditionnels améliorés du Département médecine traditionnelle; Pr Rokia Sanogo: Pharmacopée de l’Afrique de l’Ouest, un outil de formation, de recherche et de développement des Phytomédicaments; Pr Rokia Sanogo: Place des Plantes Médicinales et des Phytomédicaments en Afrique. Exposition des produits Stand d’exposition des MTA du DMT/INRSP, des MTA antipaludiques et des plantes médicinales antipaludiques à la cérémonie d’ouverture de la Journée mondiale de lutte contre le paludisme à l’INRSP le 25 avril 2015. Stand d’exposition des MTA du DMT/INRSP et des banderoles par rapport aux opportunités de la production à grande échelle dans le cadre d’un partenariat public-privé au 16ème Forum Pharmaceutique International de Bamako du 04 au 06 Juin 2015. Son engagement En tant que femme, en plus des thèmes généraux de recherche, ses projets sont surtout orientés à la recherche de solutions aux problèmes spécifiques aux femmes (mortalité maternelle, Mutilations Génitales Féminines, contraception, stérilité, dysménorrhées, troubles liées à la ménopause, etc.) Son souhait: C’est de former des jeunes et de les transmettre l’amour de la recherche sur la médecine traditionnelle qui est une grande richesse de notre patrimoine culturelle et dont l’exploitation judicieuse peut contribuer au développement durable de notre pays. Ses perspectives: En perspective, elle entend continuer le renforcement de l’enseignement de la Pharmacognosie et la recherche sur les plantes médicinales pour mettre à la disposition des populations maliennes des médicaments à base de plantes sûrs et efficaces. Il est très important de capitaliser les nombreuses opportunités qui se présentent pour la création de plateforme de formation, de recherche et de développement soutient-elle. Sa nomination Sa récente nomination comme chef du DMT, est pour elle une très grande opportunité, qui intervient après 28 ans d’engagement au service de la valorisation des ressources de la Médecine Traditionnelle. Tout en rendant hommage à tous ses maîtres et particulièrement aux enseignants chercheurs de Pharmacognosie qui ont eu à diriger avant elle le DMT, elle espère bien avec leurs bénédictions, capitaliser les nombreux résultats obtenus depuis la création d’une structure de recherche sur la Médecine et la Pharmacopée Traditionnelles africaines. Note spécifique à l’ordre des pharmaciens du Mali: Sa nomination comme Chef de DMT vient renforcer le partenariat public-privé avec le secteur pharmaceutique professionnel dans la production et la distribution des MTA, conformément au thème et aux recommandations du Forum Pharmaceutique International de Bamako 2015. Elle remercie pour cela le CNOP, les Syndicats et toutes les organisations professionnelles de Pharmaciens et tous les pharmaciens. Enfin, elle salut la collaboration des pharmaciens dans différents secteurs d’activités dans l’intérêt de la sécurité du patient et de la santé publique. Nous souhaitons plein succès au Pr Rokia SANOGO dans ses nouvelles fonction pour que, vive la profession pharmaceutique au Mali. |